Le travail et l'argent

 

En survolant mon parcours, on pourrait penser que j’ai fui le travail dans ma jeunesse.
Après que l’enfant caractériel ait laissé place à l’ado paumé, le jeune marginal ne voulait pas devenir un produit conforme aux normes sociales. Pour autant, dans ma rébellion adulescente, je ne rejetai pas le travail en tant que tel. J’aimais bien travailler, me rendre utile, gagner en autonomie. Mais m’inscrire (même de loin) dans un plan de carrière, était inconcevable pour moi. « Le rejet du système », gueulent les jeunes d’hier, d’aujourd’hui et de demain…

Parmi les amalgames de ma trop longue adolescence, j’ai éprouvé beaucoup de mépris pour l’argent. Pendant des années, j’ai assuré le minimum pour ma survie, naviguant à vue dans mes contradictions. Mais même avide d’indépendance, j’arrivais pas trop mal à gérer ma vie de vague, ah bon ?!... Je me suis vite découvert des aptitudes à gérer un budget rikiki. Je n’avais pas besoin de grand-chose pour donner un petit peu de sens à ma vie. Mes possessions se sont longtemps limitées à guère plus qu’une guitare et un sac à dos. Plus tard, j’ai doublé mon patrimoine en achetant un vélo, histoire de voyager différemment…
Mon mépris de l’argent et du luxe n’était qu’une expression de mon rejet plus global de la matérialité. Mon idéalisme névrotique me poussait à ne pas être très incarné. Bien que né d’un papapillon et d’une mamantortue, je papillonnais à l’époque le nez dans les étoiles en ayant si peu les pieds sur terre.

Il me semblait que je n’avais aucune ambition sociale. C’était faux ; elle était bien présente en moi mais très refoulée pour de multiples raisons. Ces raisons ont été identifiées au cours des premières séances de psychothérapie. Au fil de ce travail libérateur, j’ai peu à peu pu envisager et réaliser de gagner plus décemment ma vie. Beaucoup de choses ont changé. Mon activité professionnelle, bien qu’encore un peu irrégulière, me permet de payer les traites de ma maison. Je pratique des métiers que j’aime. Je pense avoir trouvé un compromis intéressant entre les exigences de ma terrestréité et les non moins exigeantes aspirations de mon esprit.

Il me reste encore quelques transactions intérieures à faire pour être encore plus en phase avec mon haut et mon bas. J’y TRAVAILLE…


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